Publié le 29 août 2016 par Fabrice Mazoir, mis à jour le 5 octobre 2023
Laurent Le Daniel
Un pâtissier-esthète en quête de simplicité
Laurent le Daniel est un grand nom de la gastronomie bretonne. Le pâtissier, meilleur ouvrier de France, est installé à Rennes depuis 20 ans. Portrait d’un pâtissier en quête de perfection et de simplicité.
Rennes, un choix de raison et de passion
Laurent le Daniel n’aime pas trop parler de lui. Il préfère s’exprimer à travers ses pâtisseries, chocolats, macarons et gâteaux qui font le délice des clients qui poussent la porte de ses 4 boutiques rennaises. Auréolé de son titre de meilleur ouvrier de France, Laurent Le Daniel s’est installé en 1998 dans la capitale de la Bretagne. Un choix stratégique, mais pas seulement. « J’ai choisi Rennes parce que c’est la capitale de la Bretagne et qu’à l’époque, il n’y avait pas beaucoup de pâtissiers proportionnellement à la population » confie Laurent Le Daniel « Je ne connaissais pas la ville mais j’étais bien content de revenir en Bretagne, je ne me voyais pas m’installer ailleurs que dans ma région ». Et le choix de Rennes s’est avéré payant. Sa petite entreprise compte aujourd’hui 40 salariés, « on m’aurait dit ça il y a vingt ans je ne l’aurai pas cru… » avoue modestement le pâtissier rennais.
Retour en Bretagne après un « Tour de France »
Retour sur ses débuts : originaire de Vannes, Laurent Le Daniel fait partie des Bretons qui ont quitté leur région pour mieux y revenir. Parti de Locminé, où il a débuté chez Christian Le Guennec, Laurent le Daniel est « monté à Paris » vers l’âge de 19 ans. Il fait ses armes à l’Hôtel Nikko puis à la maison Peltier, une référence dans le métier. En 1991, il quitte la région parisienne pour Chambéry et La duchesse de Mazarin où aurait été inventée la truffe au chocolat. Il rejoint ensuite Patrick Chevallot à Val d’Isère. Il accompagne alors celui qui sera lauréat du concours des Meilleurs Ouvriers de France (MOF) en 1993.
Fort de cette expérience dans des maisons renommées, Laurent Le Daniel est sélectionné pour enseigner à l’Ecole Nationale de Pâtisserie et donne des cours dans un CFA en Haute-Loire. En parallèle, il prépare le concours du MOF qu’il remporte en 1997.
Etre meilleur ouvrier de France a évidemment contribué à la notoriété du pâtissier, même s’il ne se repose jamais sur ses lauriers. « C’est une sacrée pression, on ne nous pardonne rien et il faut sans cesse se remettre en question pour continuer de progresser » affirme Laurent Le Daniel. « Notre métier repose sur l’humain, on n’est jamais à l’abri d’une erreur, il faut être attentif au moindre détail… » Le souci du détail et le goût pour une esthétique épurée sont la marque de fabrique de sa pâtisserie.
4 boutiques, un laboratoire et 40 salariés
L’histoire commence donc avec l’ouverture d’une première boutique, Place de la Mairie. Pour des raisons de place le « laboratoire » est installé dans le quartier de Bourg L’Evêque. 200 mètres carrés où sont élaborées les pâtisseries pendant 6 ans.
Assez rapidement, en 2004, Laurent le Daniel saisit l’opportunité d’ouvrir une deuxième boutique, rue Jules Simon à proximité des Halles Centrales, « le cœur gourmand de la ville ». « Nous avons eu la chance de pouvoir nous y installer, j’ai sauté sur l’occasion » se souvient Laurent Le Daniel. Parallèlement il construit un nouveau laboratoire à Saint-Jacques de la Lande, adossé à une boutique. « Cela nous donne une liberté d’action dans les locaux où nous sommes à l’aise et c’est un vecteur de croissance ». D’autres ouvertures accompagneront le succès remporté par le pâtissier : la boutique de la rue de la Monnaie avec ses belles boiseries ouvre en 2014, juste après l’installation d’un kiosque dans la galerie de l’Alma en 2013. Le succès de sa « petite entreprise », Laurent Le Daniel le doit à une clientèle très fidèle qu’il aime soigner et avec qui il partage sa passion de la pâtisserie.
Le goût du partage
En décembre 2015, c’est la sortie de son livre, sobrement intitulé « Ma pâtisserie », avec 50 recettes originales et accessibles. « Je l’ai fait surtout pour mes clients, je n’exprime pas trop par la parole, je préfère le faire par l’écrit » avoue Laurent Le Daniel. « Ce sont de vraies recettes, je n’ai pas de secrets, je préfère les transmettre plutôt que de les garder pour moi ». Pas de secret de fabrication mais un tour de main qui fait la différence. « Les recettes c’est une chose, il faut un petit plus, le sens du détail, qui n’est pas donné à tout le monde, même aux professionnels ».
“La technique est plus importante que la matière première”
Et en pâtisserie, selon lui, le produit ne fait pas tout. « La technique est plus importante que la matière première. On peut rater un gâteau avec des produits très nobles si on manque un paramètre dans le mélange ou la température ». La précision du métier, il la partage encore lorsqu’il anime des ateliers. Ces ateliers répondent à une forte attente de la clientèle de mettre la main à la pâte. « C’est beaucoup de plaisir même si c’est parfois épuisant, je me donne à 100%. A la fin je suis vidé comme après un match de tennis » explique le pâtissier. « Dans notre métier nous sommes constamment dans le partage. Mon premier plaisir en tant que chef d’entreprise c’est de voir les yeux gourmands des clients qui achètent mes gâteaux et qui reviennent ensuite parce qu’ils ont apprécié l’expérience ».
Une esthétique simple et gourmande
Si Laurent le Daniel n’a pas de secret de fabrication, il voue un culte à la simplicité. « Quand on débute dans le métier, on veut trop bien faire. En ajoutant des ingrédients, on perd parfois en simplicité. Le plaisir simple est souvent le meilleur » rappelle le meilleur ouvrier de France.
La simplicité saute aux yeux quand on contemple ses gâteaux, dont le design fait partie de la « marque de fabrique Le Daniel ». La création d’un gâteau commence toujours par un dessin, un art dans lequel Laurent Le Daniel excelle aussi. Il a d’ailleurs failli emprunter cette voie avant de devenir pâtissier et a pris des cours de dessin lorsqu’il était à Paris. « L’esthétique et la gourmandise sont étroitement liées. L’émotion s’exprime d’abord par le regard et par des choses sobres. Je suis sans doute influencé par le Japon qui est un peu mon deuxième pays puisque ma femme en est originaire et nous y allons souvent » raconte Laurent Le Daniel. « Dans cette culture, la simplicité de l’esthétique est très présente ». L’épure se décline jusque dans l’aménagement des boutiques sur lequel veille son épouse, Aki.