Publié le 14 novembre 2017 par Fabrice Mazoir, mis à jour le 5 octobre 2023
Le carton du mariage d’Anne de Bretagne de retour au Parlement
La tapisserie originale était partie en fumée, son modèle est à nouveau visible à Rennes
C’est une histoire incroyable : celle d’un pan du patrimoine breton qu’on croyait perdu. Le carton de la tapisserie représentant le mariage d’Anne de Bretagne a été dévoilé lundi 13 septembre 2017 au Parlement de Bretagne, à Rennes. Une peinture monumentale de 6 mètres par 5, le modèle de la tapisserie originale aujourd’hui disparue, à admirer dans la Grand’ Chambre lors des visites guidées du Parlement.
Un long travail d’enquête et de restauration
Quand on visite le Parlement de Bretagne, on en prend plein les yeux : les boiseries, les plafonds dorés, les toiles peintes, la salle des Pas perdus et la Grand’ Chambre impressionnent par leurs dimensions et leurs décors. Mais dans le Parlement, construit au début du XVIIème siècle, il manque des éléments importants. Le Musée des Beaux Arts de Rennes a permis d’en redécouvrir certains dans ses réserves et de les exposer en 2016 lors d’une grande exposition consacrée aux “tentures du Parlement – un décor oublié du Palais de Justice”. Et si l’un des modèles illustrant le mariage d’Anne de Bretagne vient de faire son retour au Parlement, après avoir été restauré grâce à la mobilisation du Musée, de mécènes et des collectivités, d’autres tapisseries manquent encore à l’appel. En raison d’une série de péripéties assez incroyables.
Les tapisseries d’abord sauvées en 1994, partent en fumée en 1997
Au moment de l’incendie du Parlement de 1994, toutes les tapisseries du Parlement de Bretagne avaient pu être sauvées. Mais en 1997, comble de malchance, les tapisseries partent en fumée dans l’incendie de l’atelier où elles devaient être restaurées à Montrouge, près de Paris.
On pense avoir perdu définitivement tout un pan du décor, qui illustrait l’histoire de la Bretagne et son Union avec la France à travers différents événements symboliques et personnages emblématiques : le mariage d’Anne de Bretagne avec Charles VIII, l’entrée d’Henri IV dans Rennes, la mort du connétable Duguesclin… 11 tapisseries au total avaient été commandées pour orner les murs de la Grand’ Chambre.
L’original perdu, il restait à retrouver la trace du modèle
Une série de tapisseries dont la fabrication s’étale de 1899 à 1925. Pour assurer cette commande, la plus importante du genre en France à l’époque, la Manufacture des Gobelins réalisait d’abord des modèles à la même échelle. Ces « cartons » étaient installés en attendant que la tapisserie soit terminée. Les modèles étaient ensuite dispersés pour décorer d’autres bâtiments publics et il n’était pas rare qu’ils tombent dans l’oubli, en particulier quand leur « style pompier » était passé de mode.
“Une enquête digne de Sherlock Holmes”
Quand les originaux ont été réduits en cendres, il a fallu, pour retrouver les traces des modèles, mener une « enquête digne de Sherlock Holmes » selon Xavier Ronsin, Premier président de la cour d’appel. Grâce notamment au travail acharné de Guillaume Kazerouni, responsable des collections anciennes au musée des beaux-arts, les réserves du mobilier national ont été ratissées pour retrouver les cartons, parfois roulés ou pliés parmi des milliers d’autres. Celui du mariage d’Anne de Bretagne, peint par Edouard Toudouze, a finalement été retrouvé dans un grenier de la Préfecture. Restauré et monté sur un châssis, il a retrouvé sa place au Parlement un peu plus d’un siècle après y avoir été installé une première fois en 1901.
Le retour de cette œuvre de 6 mètres par 5 est une raison supplémentaire d’aller visiter le Parlement de Bretagne. L’occasion de remonter le temps à travers les différents décors d’un monument du patrimoine rennais et breton. Et l’histoire est loin d’être terminée : 6 autres cartons restaurés pourraient faire leur retour au Parlement dans les années à venir…